Covid-19 : la newsletter du Pr Adnet<br> (n°70 - 10 mars 2022)<br>C'était la dernière... Merci Professeur !

Possible d’attraper le BA.2 après le BA.1 ? Immunité vaccinale vs post-infection, match relancé. Résultats définitifs pour la pilule Pfizer® ... Mais surtout, clap de fin de cette newsletter et un bel «Au revoir» du Pr Adnet.

Frédéric Adnet est professeur agrégé de Médecine d'Urgence et chef des Urgences de l’Hôpital Avicenne et du SAMU 93. À la fois chercheur et médecin, sa FAQ a connu un succès phénoménal. À l'origine destinée aux professionnels de son service, elle est maintenant traduite en plusieurs langues.

Dans son interview, Frédéric Adnet revient sur ce succès et explique son attachement à l'Evidence-based medicine. Il est également l'auteur de l'ouvrage Les Fantassins de la République - Urgence COVID, un printemps en enfer, paru en octobre 2020.

 

INDEX et liste des FAQ / Newsletters


Newsletter Covid-19 n°70 (10 mars 2022)
 

«Toutes les bonnes choses ont une fin, les mauvaises aussi heureusement.»

Au moment où cette pandémie Covid-19 semble se transformer en une endémie, maladie permanente certes, mais avec un faible impact et plus facilement contrôlable, il semble que le moment soit venu d’interrompre cette newsletter.

J’ai débuté cette chronique le 12 mars 2020, en pleine première vague, meurtrière. Elle s’adressait aux internes et aux médecins de mon service (Urgences-Samu de l’hôpital Avicenne), déboussolés par l’horreur que nous vivions.

Le but était de leur apporter un peu de rationnel et de factuel dans la compréhension de ce qui nous tombait dessus. Comme les praticiens manquent de temps pour se concentrer sur la littérature, je considérais comme une mission la diffusion de ces courts résumés des données scientifiques disponibles.

Surprise. Cette lettre a rapidement dépassé les frontières de notre service des urgences. D’abord quotidienne - les fameuses FAQ -, puis hebdomadaire et finalement bimensuelle, cette newsletter a eu un succès inattendu m’obligeant à un devoir de travail de plus en plus exigeant.

Distribuée par une dizaine de sites – plus de 240.000 téléchargements pour le seul site calaméo® – et partagée par plusieurs collèges, professionnels ou particuliers, j’ai vu aussi cette lettre partir vers tous les DOM-TOM et à l’étranger. Jusqu’à atteindre une liste de diffusion personnalisée de 4.000 membres (avec seulement deux demandes de retrait).

Quarante-six FAQ et soixante-dix Newsletters après, je suis finalement assez fier du travail accompli. Il n’avait pas d’autre but que d’apporter une information scientifique simplifiée (je n’aime pas le mot vulgarisée), accessible aux non-médecins, mais en évitant toute simplification grossière. J’ai d’ailleurs tenu à privilégier la langue française, en traduisant toute l’iconographie.

Je tiens à remercier mon fidèle bras doit, Malika Chafaï qui a assuré les relectures, la gestion de la liste de diffusion et les envois. Je remercie aussi tous les contributeurs à cette Newsletter qui m’ont réellement aidé dans ce travail de cet énorme tri d’une littérature scientifique pléthorique. Parmi les contributeurs, je ne peux pas ne pas citer le Dr Axel Ellrodt pour ses envois, son expertise et son humour, ce dernier trait que j’apprécie particulièrement.

Enfin j’espère, modestement, que ce travail d’information aura permis à certains d’entre nous soignants, patients, citoyens, de démêler le pertinent du flot de la désinformation.

Cette lettre aura été pour moi une aventure, riche, et je tiens vraiment à rendre hommage à mes lecteurs qui, dans leurs messages, au travers de leurs encouragements et de leurs soutiens que j’ai reçus, ont alimenté maintenu en moi une énergie qui m’a permis d’être, je l’espère, toujours au rendez-vous.

Ce Covid-19 devrait désormais rejoindre les rangs des maladies endémiques maîtrisables et devenir comme les autres maladies contagieuses. Toutes les mauvaises choses ont une fin.  

Cette newsletter, et seulement elle, prend sa retraite.

Toutes les bonnes choses ont une fin !

Du fond du cœur, merci.


Frédéric Adnet





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OMICRON


Le variant BA.2, on peut l’attraper après le BA.1

On sait qu’il existe des sous-variants au variant Omicron. Parmi ceux-ci figure le BA.2, qui semble plus contagieux que l’Omicron BA.1 , jusqu'alors majoritaire dans notre pays. Mais voilà, après le Danemark, le BA.2 semble remplacer le BA.1 (cf. newsletter n°69).

Bien que de dangerosité équivalente, on aimerait bien savoir si le fait d’avoir été contaminé par l’Omicron BA.1 protège d’une nouvelle infection BA.2. Des chercheurs danois se sont intéressés à cette problématique (medRxiv non encore reviewé, 22 février 2022).

Au final, cette éventualité n’est pas nulle mais la primo-infection au BA.1 semble protéger du passage vers une forme grave. Malheureusement, l’échappement immunitaire que l’on craignait existe bel et bien pour le BA.2.

Encore une fois, le vaccin semble renforcer nos défenses immunitaires contre ce phénomène compte-tenu du fait que l’immense majorité de la population danoise était vaccinée au moment de l’étude alors que la majorité des réinfections BA.1-BA.2 survenaient chez des non vaccinés.



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VACCINS


Immunité vaccinale vs post-infection : c’est reparti !

Le débat n’est toujours pas terminé. Quelle est la différence d’efficacité entre l’immunisation vaccinale comparée à l’immunité naturelle induite par une infection au SARS-CoV-2 ?

Il semblait que l’immunité «naturelle» avait un avantage (cf. newsletter n°59). Eh bien une équipe de chercheurs vient de publier des résultats contraires : l’immunité procurée par le vaccin à ARNm est probablement plus efficace que l‘immunité induite par l’infection. 

En analysant le pouvoir neutralisant et le taux d’anticorps des patients convalescents d’une infection Covid-19 d’une part, et de personnes vaccinée d’autre part, les auteurs ont trouvé que ce taux des anticorps anti protéine S était environ 17 fois plus élevé chez les personnes vaccinées et avait une activité neutralisante plus efficace comparé aux patients convalescents (Scientific Reports, 16 février 2022). 

La cible des anticorps était la région RBD de la protéine Spike comportant la mutation N501Y, mutation retrouvée dans les variants anglais (B.1.1.7 ou Alpha), le variant sud-africain (Beta), brésilien (Gamma) et aussi... dans le variant Omicron. 

Les chercheurs ont utilisé les anticorps prélevés dans 41 échantillons de sérums provenant de 33 patients non vaccinés, convalescents du Covid-19 (souche historique, ne contenant pas la mutation N501Y). Les taux d’anticorps ont été comparés à ceux de personnes qui avaient reçu deux doses de vaccin ARNm.

Au final, dans ce match vaccin / infection , le score est 1-0 ! 

[Merci au Dr Axel Ellrodt]


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(A) comparaison des taux d’anticorps anti-protéine S entre des patients nouvellement malades de la Covid-19 (marron), des patients convalescents de la Covid-19 (bleu), des patients non infectés et vaccinés avec un vaccin ARNm (vert) et des patients prélevés avant la pandémie Covid-19 (bleu clair).
Il y a une augmentation significative du taux d’anticorps chez les patients vaccinés comparée aux patients convalescents.
(B) comparaison du pouvoir d’inhibition de la liaison entre la protéine S du SARS-CoV-2 et le récepteur cellulaire ACE2 entre des patients convalescents de la Covid-19 (marron) et des patients vaccinés (bleu).
Les patients vaccinés montrent une inhibition de cette liaison beaucoup plus importante que pour les patients convalescents.






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TRAITEMENTS


Résultats définitifs pour la pilule Pfizer® !

Nous avons vu les résultats un peu décevants du traitement oral des laboratoires Merk® (molnupiravir) dans la newsletter n°69. Nous avions aussi parlé de la pilule concurrente, celle du laboratoire Pfizer (nirmatrelvir). 

Des résultats très encourageants avaient été publiés sous forme de communiqués de presse. Ils portaient sur la réduction du risque de décès et/ou hospitalisation chez des patients à risque de formes graves (cf. newsletters n°62 et n°65). 

Rappelons que le médicament de Pfizer, commercialisé sous le nom de Paxlovid®, est une association d’une molécule originale : le nirmatrelvir (300 mg) et d’une autre molécule, le ritonavir (100 mg).

La nirmatrelvir est un antiviral direct de type anti-protéase et censé s’opposer à la réplication virale du SARS-CoV-2. Le ritonavir augmente la disponibilité de cet anti-protéase en s’opposant à la dégradation biologique du nirmatrelvir. 

Dans l’essai clinique validant ce médicament, les auteurs ont randomisé (contre placebo) des patients non vaccinés Covid-19+, non hospitalisés avec des facteurs de risque d’évolution vers une forme grave (NEJM, 16 février 2022). 

Résultats :

Bon, un médicament très prometteur et d’ailleurs la France en a acheté des kilos !


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Évolution temporelle de l’évènement décès et/ou hospitalisation entre un groupe de patients à risque Covid-19+ recevant le Paxlovid® dans les 5 premiers jours après les premiers symptômes (rouge) et un groupe placebo (bleu). On note une diminution significative de l’incidence de cet évènement dans le groupe traité.


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