Covid-19 : la newsletter du Pr Adnet (N°14 - 11 août)

Dans cette newsletter, les caractéristiques des formes asymptomatiques de la COVID- 19, un classement sur l’efficacité des masques pour réduire la transmission des postillons, une idée originale avec les toutous renifleurs, et des résultats sur les écoles (on les ouvre ou pas ?). Enfin une recherche sur la diffusion de la maladie dans les établissements pour personnes âgées, en recherchant des facteurs liés à ces établissements.

Depuis le 12 mars, le Pr Frédéric Adnet - professeur agrégé de Médecine d'Urgence, chef des Urgences de l’Hôpital Avicenne et du SAMU 93 - fait régulièrement le point sur le Covid-19.
Après 46 numéros d'une FAQ quotidienne, il propose désormais une newsletter hebdomadaire. Nous la reproduisons ici avec son aimable autorisation. 

INDEX et liste des FAQ / Newsletters


NEWSLETTER N°13 (04 août)


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ÉPIDÉMIOLOGIE


Charge virale et forme asymptomatique

On parle de plus en plus du rôle important dans la propagation de l’épidémie des formes asymptomatiques, véritables «casse-tête» pour une politique de dépistages  systématiques. Dans cette catégorie, il faut bien différencier les formes «présymptomatiques» - c’est à dire pas de symptôme au moment du diagnostic mais ces patients auront des symptômes plus tard - et les formes réellement «asymptomatiques», c’est-à-dire qu’ils feront la maladie sans aucun symptôme décelable.

Un travail rétrospectif coréen (JAMA Internal Medicine, 6 août 2020) s’est attaché à caractériser les patients asymptomatiques (N=89) et présymptomatiques (N=21). Les auteurs les ont comparés à une cohorte de patients symptomatiques (N=193).

Bref, dans cet article tout se passe comme si virologiquement et démographiquement il n’y a pas de différence entre les patients symptomatiques ou les patients asymptomatiques. Bon, ça ne va pas aider au dépistage des formes asymptomatiques !


Évaluation de l’efficacité des masques

Des auteurs ont imaginé un petit bricolage permettant d‘évaluer rapidement l’efficacité des masques (Sciences Advances, 7 août 2020). En bref, on demande au porteur de masque de parler dans une pièce sombre. Un laser couplé à la caméra d’un téléphone portable peut, avec ce montage, dénombrer les postillons de diamètre supérieur à 5 µm. On peut ainsi se bricoler ce détecteur pour moins de  200 euros.  Les auteurs ont  testé 14 sortes de masques : du FFP2 jusqu’au masque «bandana» ou «cache col».

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Figure de gauche : les 14 masques testés.
La figure de droite montre le taux de diffusion des postillons comparée à la valeur de référence qui est « pas de masque ». Les petits cercles représentent un essai avec 4 volontaires différents pour un masque.

Les chercheurs ont demandé à un volontaire de parler à haute voix avec un des 14 masques et ils ont évalué la diminution du nombre de postillons par rapport au cas où il ne portait pas de masque (Schéma). Ils ont pu ainsi classer les masques du plus efficace au moins efficace. On remarque que le masque chirurgical fait aussi bien que le FFP2 avec cette méthode de mesure. Par contre le bandana : c’est une catastrophe !

(Merci au Dr Axel Ellrodt)


Écoles, on ouvre … ou pas ?

Les résultats sur la responsabilité des enfants dans la transmission du virus et concernant l ‘influence de l’ouverture ou de la fermeture des écoles sur l’épidémie commencent à être complètement contradictoires. Des études remettent en question le faible impact des enfants dans la propagation de la maladie.  Cette  dernière étude sur des écoles australiennes va dans l’autre sens (Lancet Child Adolesc Health, 3 août 2020).

Des auteurs ont cherché à connaître les modalités de propagation du virus dans les établissements scolaires. La plupart des écoles sont restées ouvertes en Australie pendant la première vague de l’épidémie de la COVID-19. La politique était d’isoler les cas avérés de COVID-19 chez les enfants et enseignants pendant 14 jours et d’isoler également tous les cas contacts.

Les auteurs concluent en un impact extrêmement faible des écoles dans la diffusion du virus à condition qu’une politique de dépistage et de distanciation soit instaurée. Article assez encourageant qui va contre la fermeture des écoles.


Mortalité dans les EHPAD

En France, on sait qu’environ un tiers de la mortalité de la COVID-19 survient dans les établissements accueillant les personnes âgées. Pour les États-Unis ce chiffre est à peu près similaire (27%). Des auteurs ont voulu savoir s’il existait des déterminants pour cette mortalité liés aux établissements (JAMA, 10 août 2020). Ils ont classé 4.254 établissements américains pour personnes âgées en fonction de trois séries de critères : qualité, niveau de soins et personnels soignants. Ils ont comparé ensuite les établissements ayant beaucoup  de patients COVID-19 (<10 ; 11-30 et >30) en fonction de ces critères.

Résultat : seul le critère «personnels soignants» (nombre d’infirmières parmi le personnel soignant, nombre de personnel par patient, temps passé auprès des patients) permettait d’avoir une influence significative sur le nombre de cas COVID-19 dans ces établissements (OR 0,82 ; IC95%[0,70-0,95]).

On ne le dira jamais assez : le manque de personnels bien formés dans les EHPAD est une source majeure de morbi-mortalité due à cette maladie…


Et les chiens renifleurs ?

Ce n’est pas une blague ! Plusieurs équipes ont voulu savoir si l’odorat de nos toutous pouvait discriminer les patients atteints de la COVID-19. On sait que l’odorat des chiens est performant pour détecter certaines maladies comme le cancer.

Espérons que cette hypothèse ne finisse pas comme les avions renifleurs de Giscard…
Affaire à suivre !

(Merci au docteur Sébastien Beroud)