Faut-il réviser la prescription des neuroleptiques chez les personnes âgées ?

Chez les sujets âgés ayant bénéficié d’un arrêt de la prescription des traitements neuroleptiques ou d’une réduction de leurs posologies, on a assisté à une diminution de la sévérité des troubles du comportement en comparaison avec les autres personnes chez qui les traitements ont été maintenus.

Selon une étude parisienne, la révision de la prescription des neuroleptiques chez les personnes âgées hospitalisées a apporté des  bons résultats au bout d’une semaine.

Chez les sujets âgés ayant bénéficié d’un arrêt de la prescription des traitements neuroleptiques ou d’une réduction de leurs posologies, on a assisté à une diminution de la sévérité des troubles du comportement en comparaison avec les autres personnes chez qui les traitements ont été maintenus.

Une amélioration chez le groupe ayant bénéficié d’une révision des traitements neuroleptiques

A cause des nombreux effets secondaires associés à la prescription des neuroleptiques chez les sujets âgés, la HAS (Haute autorité de Santé) recommande une révision régulière de la prescription de ces thérapeutiques en gériatrie. Cependant, et devant les résultats discordants des différentes études conduites auparavant sur des personnes âgées atteintes de pathologies neurodégénératives, la crainte du risque d’augmentation et d’aggravation des troubles de comportement reste le souci majeur des prescripteurs.

Cette étude multicentrique compare un groupe de sujets âgés chez qui les traitements neuroleptiques ont été révisés à un autre groupe chez qui les traitements ont été maintenus. 78 personnes ont été recrutées ayant une moyenne d’âge de 81,6 ans. 65% étaient des femmes et 85% étaient atteints de démence. Les participants à l’étude étaient hospitalisées dans cinq établissements du groupe hospitalo-universitaire de Paris Nord Val-de-Seine et présentaient des troubles du comportement identifiés et cotés selon l’échelle NPI-ES (inventaire neuropsychiatrique – équipe soignante) établie à partir de 12 manifestations cliniques : idées délirantes, hallucinations, agitation, agressivité, symptômes dépressifs... avec un score allant de 0 à 144. Les traitements neuroleptiques prescrits appartenaient à la deuxième génération dans 74% des cas.

A J0, le médecin décidait la révision ou le maintien des traitements neuroleptiques, aboutissant ainsi à la formation de deux groupes de patients.  En totalité 38 patients ont bénéficié de la révision de leurs traitements neuroleptiques. A J8, les données collectées ont été comparées aux données relevées initialement (score NPI-ES, impression clinique globale des troubles du comportement) afin de fournir conclusions quant à l’évolution du degré et de la sévérité de ces troubles.  Les données ont été aussi ajustées sur la sévérité des manifestations et l’appréciation subjective de l’équipe médicale et paramédicale a été prise en compte afin de confirmer ou d’infirmer les résultats.

Les résultats ont montré que dans le groupe des patients ayant subi une révision de leur traitement neuroleptique, le score NPI-ES initial était de 26,06 à J0 est a diminué de 9,74. Le score du groupe au traitement inchangé n’a diminué que de 4,60. La différence étant significative entre les deux groupes après ajustement sur le score de départ.

L’appréciation subjective par les médecins et l’équipe paramédicale entre J0 et J8 dans le groupe au traitement modifié conclut aussi à une amélioration notable supérieure à celle enregistrée dans le groupe au traitement maintenu.

Des études supplémentaires peuvent apporter plus d’éléments

Cette étude a cependant certaines limites et biais qui ont pu avoir un impact sur les résultats enregistrés. En effet, la répartition des personnes âgées dans les deux groupes n’était pas randomisée à cause des problèmes éthiques que cela poserait, mais plutôt basée sur l’appréciation de l’équipe médicale et sur le profil du patient en question. Ceci pourrait faire supposer que la décision de diminuer les doses ou d’arrêter carrément les thérapeutiques a été prise pour les patients chez qui on assistait déjà à une amélioration des troubles du comportement. D’autres motifs peuvent aussi avoir été pris en compte dans cette décision dont l’absence d’indication initiale ou l’apparition de signes d’intolérance. D’ailleurs, ceci confirme les recommandations de la HAS qui affirme «  qu’une bonne partie des médicaments neuroleptiques prescrits peuvent être arrêtés ou réduits sans aucun risque, à minima à court terme ».

Aussi, l’appréciation de l’évolution de l’état des patients s’est fait à court terme, soit une semaine après. Or, cela peut masquer l’effet rebond qui n’apparaît que beaucoup plus tard après arrêt des neuroleptiques à cause de la longue demi-vie de ces traitements. Enfin, les alternatives médicamenteuses ayant pris la place des neuroleptiques n’ont pas été prises en compte dans cette études.

Sources : Houenou Quenum N et al. Impact de la diminution des neuroleptiques sur les troubles du comportement en gériatrie. NPG Neurologie - Psychiatrie – Gériatrie. Available online 1 August 2018 In Press, Corrected Proof https://doi.org/10.1016/j.npg.2018.06.00