L’usage détourné des sirops antitussifs chez les jeunes

De plus en plus de cas d’adolescents ou de jeunes adultes consommant des sirops antitussifs à visée récréative ont été mis en évidence. Si le phénomène n’est pas nouveau, il commence à se populariser et à inquiéter sérieusement les professionnels de santé. « Purple drank », mélange de sirop codéiné et de soda Les « purple drank », « sizzurp » ou

De plus en plus de cas d’adolescents ou de jeunes adultes consommant des sirops antitussifs à visée récréative ont été mis en évidence. Si le phénomène n’est pas nouveau, il commence à se populariser et à inquiéter sérieusement les professionnels de santé.

« Purple drank », mélange de sirop codéiné et de soda

Les « purple drank », « sizzurp » ou « dirty Sprite » consistent en un mélange de sirop antitussif codéiné, de limonade et de médicaments antihistaminiques H1 (le cas échéant). Ce « cocktail » est né aux Etats-Unis dans les années 90 et à été popularisé par des rappeurs américains comme le célèbre DJ Screw (mort d’une overdose de codéine en 2000). La codéine est un opiacé qui a comme effet une désinhibition de soi, un sentiment de bien-être, de légère euphorie… En bref, une impression de « planer ». Les histaminiques permettent de limiter les effets secondaires du sirop (qui peut provoquer de violents vomissements et des démangeaisons) et le soda sert pour le goût.

L’ANSM a publié en mars 2016 une mise en garde de l’usage détourné de ces médicaments. En effet, beaucoup de ces sirops sont disponibles sans ordonnance. Connus sous les noms commerciaux « Codédrill », « Euphon » ou « Pulmosérum » pour ne citer qu’eux, nombreux sont les sirops antitussifs codéinés délivrés sans ordonnance et à des prix accessibles. L’ANSM a alors remarqué dès 2013 une importante hausse de la demande de ces médicaments, de « délivrance suspectes » et de « cas de dépendance ou d’abus ayant pu conduire à une hospitalisation ».

Les effets indésirables rapportés sont une somnolence, des troubles du comportements, un syndrome confusionnel et des crises convulsives généralisés entre autres. Consommé à forte dose pour ressentir ses effets, les sirops codéinés peuvent aboutir à des intoxications plutôt graves, allant jusqu’au coma.

Le « DXM » et ses effets hallucinogènes

Le dextrométhorphane est un dérivé morphinique à action centrale, utilisé comme antitussif. Il est la substance active de médicaments comme le « Tussidane », « Vicks » ou encore « Humex », tous disponibles sans ordonnance en officine. Plus connu sous le nom « DXM », le dextrométhorphane est détourné pour ses effets psychotropes à fortes doses.

L’absorption importante de sirop contenant du DMX peut avoir des effets variables : stimulation, hallucinations, dissolution de la réalité, expériences de mort imminente, etc. Les effets secondaires – nombreux – sont psychiques , comportementaux, gastro-intestinaux et dermatologiques. La dépendance s’installe rapidement et des séquelles psychiatriques potentiellement graves, surtout à long terme, peuvent survenir. L’intoxication, quant à elle, se traduit par une dépression respiratoire et un coma toxique.

Une attention particulière demandée aux pharmaciens

Si l’usage détourné de ces médicaments en vente libre est difficile à estimer, l’ANSM demande une certaine vigilance de la part des pharmaciens, qui peuvent refuser une demande suspecte de médicaments comportant de la codéine, du DXM ou un antihistaminique. De plus, beaucoup de ces sirops existent en forme de comprimés, ce qui permette une absorption plus facile de doses importantes, et une « défonce » à prix peu élevé, avec les conséquences physiques, psychologiques et sociales que l’on connaît d’autres drogues.

En plus de DJ Crew, deux autres rappeurs américains sont morts d’une overdose de codéine due au purple drank en 2007 et 2015. Selon l’ANSM, trente-neuf cas d’usage détourné de DXM ont été signalé de 2007 à 2013, un chiffre probablement très sous-estimé étant donné qu’il n’existe pas vraiment de statistiques sur ce sujet.

Texte : sb / esanum

Photo : sumire8 / Shutterstock