Schizophrénie : exploration du métabolisme de l’arginine

La schizophrénie est un trouble mental psychotique alliant principalement altérations du processus sensoriel et du fonctionnement de la pensée. Bien que la base biologique de cette pathologie soit méconnue, de nombreux facteurs ont été associés à la pathophysiologie de la schizophrénie. Contexte Récemment, le métabolisme de l’arginine y a égalem

La schizophrénie est un trouble mental psychotique alliant principalement altérations du processus sensoriel et du fonctionnement de la pensée. Bien que la base biologique de cette pathologie soit méconnue, de nombreux facteurs ont été associés à la pathophysiologie de la schizophrénie.

Contexte
Récemment, le métabolisme de l’arginine y a également été impliqué. L’arginine est un acide aminé largement présent dans le cerveau. Il peut être métabolisé en de nombreuses molécules bioactives comme l’oxyde nitrique (NO) et la citrulline, ou l’ornithine et l’urée par les enzymes NOS et arginase, respectivement. La littérature récente suggère que l’altération du métabolisme de l’arginine aurait un rôle critique dans le développement de la schizophrénie, mais toutes les voies métaboliques impliquées n’ont pas été étudiées.

Etude et méthodes
Dans le but de mieux comprendre les changements du métabolisme de l’arginine chez les individus schizophrènes, une étude récente publiée dans Translational Psychiatry (DOI: 10.1038/tp.2016.144) compare l’activité et l’expression protéique des enzymes du métabolismes de l’arginine, ainsi que la concentration d’arginine et de ses 9 métabolites dans des tissus cérébraux post-mortem d’individus schizophrènes et de contrôles non-psychiatriques appariés selon l’âge et le sexe (n=20 pour chaque groupe). La partie cérébrale étudiée est la zone BA8, responsable du dysfonctionnement du suivi de l’oeil, très fréquemment observé chez les patients schizophrènes.

Les activités enzymatiques de NOS et de l’arginase ont été mesurées par dosage radio-enzymatique et spectrophotométrique, respectivement. L’expression protéique des deux enzymes a été analysée par western-blot et celle de l’arginine et de ses métabolites par chromatographie liquide, couplée ou non à la spectrométrie de masse.

Résultats
L’activité totale de l’enzyme NOS ne varie pas entre les échantillons schizophrènes (S) et contrôles, mais l’enzyme eNOS (d’origine endothéliale) est diminuée de 25% dans les échantillons S (p=0.045). L’enzyme nNOS d’origine neuronale ne montre aucune différence d’expression. L’activité de l’arginase est augmentée de 52% dans les tissus S (p=0.0029), et l’expression de l’enzyme arginase II est augmentée de 45% (p=0.02). Aucune différence n’apparaît quant à l’enzyme arginase I.

En ce qui concerne l’expression de l’arginine et de ses métabolites, des différences ont été mises en évidence dans les tissus (S) pour le GABA (-20%, p=0.009), le ratio glutamate/GABA (+14%, p=0.03) et l’agmatine (+26%, p=0.03). Les analyses de régression linéaire ont montré une corrélation positive entre l’activité de l’arginase et âge à l’apparition de la maladie (r=0.63, p=0.0039), et entre le niveau d’ornithine et la durée de la pathologie (r=0.59, p=0.0078).

L’analyse de classification des données obtenues sur l’arginine et ses trois principaux métabolites (citrulline, ornithine et agmatine) révèle des différences de regroupement statistique de ces molécules entre les deux groupes d’échantillons, traduisant une altération de leur relation dans la zone BA8 des patients schizophrènes.

Conclusions
Cette étude est la première à décrire le profil métabolique de l’arginine dans la région BA8 du cerveau de patients schizophrènes, en prenant en considération les trois voies métaboliques impliquées. Parmi les changements mis en évidence, il est intéressant de noter la similitude entre les résultats sur l’agmatine (+26% dans les échantillons S) dans cette étude sur la région BA8 du cerveau et ceux d’une étude de 2013 sur des échantillons sanguins de patients schizophrènes. D’autres études sur l’agmatine en particulier seraient bénéfiques à la compréhension de son rôle dans le développement de la schizophrénie et pour explorer le potentiel de ce métabolite en tant que biomarqueur de la maladie.

Texte : esanum / jd
Photo : Shidlovski / Shutterstock


Découvrez d’autres comptes-rendus d’études ici : COMPTES-RENDUS D’ETUDES