La dissection sous-muqueuse endoscopique trouve ses marques en Europe

Technique venue du Japon, la dissection sous-muqueuse endoscopique s'implante en Europe. Ce travail d'orfèvre a des indications précises.



Parmi les évolutions récentes concernant le traitement des lésions colorectales, la dissection sous-muqueuse endoscopique (Endoscopic Submucosal Dissection – ESD) suscite un intérêt grandissant.

Apparue à la fin des années 1990, cette technique mini-invasive vise à réséquer en un seul fragment des lésions précancéreuses et cancéreuses superficielles, situées sous la muqueuse du tractus gastro-intestinal. Elle peut aussi être utilisée à visée uniquement diagnostique.

Ces lésions étant parfois proches du tissu musculaire, l’ESD permet de séparer la muqueuse tumorale de la sous-muqueuse saine sous-jacente. C’est une procédure très minutieuse, durant laquelle l'endoscopiste commence par délimiter les marges de la résection grâce à des points de coagulation.

Une injection de sérum physiologique ou d’une solution teintée sous la muqueuse permet ensuite de la soulever. La résection se fait avec un couteau d’électrocoagulation endoscopique spécifique.

Le Japon, un exemple à suivre

En termes de nombre d’actes réalisés et de résultats, il subsiste un écart important entre l'Europe et le Japon, pays d’origine de l’ESD. Cette technique est beaucoup plus répandue dans les pays d’Asie de l’Est (Japon, Chine, Corée) où l’incidence des cancers gastriques est particulièrement élevée.     

En 2017, une étude comparant les données asiatiques et non asiatiques a mis en évidence qu'il existait une nette différence entre ces zones géographiques. Par exemple, les saignements tardifs, la perforation ou la récurrence des lésions étaient nettement plus élevés dans la région non asiatique.

Par ailleurs, le taux global d'interventions chirurgicales est plus élevé dans les pays non asiatiques, où l'ESD est nettement moins souvent perçue comme une option thérapeutique.

Afin d’opter pour la technique thérapeutique optimale, et de réduire le nombre d'interventions chirurgicales évitables, un diagnostic différencié des lésions colorectales est indispensable.  

Différents systèmes de classification existent. La classification NICE (Narrow-Band Imaging International Colorectal Endoscopic Classification) a l’avantage d’être simple : elle classe les polypes coliques en trois catégories, en fonction de la profondeur de pénétration sous la muqueuse. Par contre, cette classification peu fine rend difficile l'identification des patients les plus indiqués pour bénéficier d’une ESD.

La classification JNET (Japan Narrow-Band Imaging Expert Team) distingue quant à elle les lésions de type 2A et 2B. Ceci permet de mieux sélectionner les candidats à l'ESD.

Les recommandations en Europe  

La première étape consiste à établir, grâce à une endoscopie haute résolution, un diagnostic précis de la lésion : taille, morphologie, emplacement et nature. Ensuite interviennent les schémas de classification (NICE, JNET). Sur la base de ces critères, il est possible de décider si l’ESD est appropriée pour traiter la lésion en question.

L'European Society of Gastrointestinal Endoscopy (ESGE) suggère notamment :

Par contre, l'ESGE ne recommande pas l'utilisation systématique de l'ESD pour les lésions duodénales ou de l'intestin grêle.

Perspectives

L'Europe a beaucoup appris de l'Asie en ce qui concerne l'ESD. L'écart entre ces zones géographiques est déjà comblé pour ce qui concerne les procédures écrites, les classifications et les programmes d'études. Il se réduit peu à peu quant à la maîtrise de la technique, les résultats et les données cliniques obtenus par l'ESD.

Bien que la méthode soit prometteuse, il faut noter que l'ESD ne convient qu'aux patients qui se trouvent encore au stade T1, alors que la majorité des personnes concernées se trouvent déjà à des stades plus avancés lors du diagnostic initial.

Autre bémol : si le taux d'efficacité de la résection à visée curative atteint près de 50%, il est encore loin du taux de guérison de près de 100% obtenu avec les résections chirurgicales au stade T1.


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Références :

- Fuccio L, Hassan C, Ponchon T, Mandolesi D, Farioli A, Cucchetti A, Frazzoni L, Bhandari P, Bellisario C, Bazzoli F, Repici A.
Clinical outcomes after endoscopic submucosal dissection for colorectal neoplasia: a systematic review and meta-analysis.
Gastrointest Endosc. 2017 Jul;86(1):74-86.e17. doi: 10.1016/j.gie.2017.02.024. Epub 2017 Feb 28. PMID: 28254526.

- Ohata K, Kobayashi N, Sakai E, Takeuchi Y, Chino A, Takamaru H, Kodashima S, Hotta K, Harada K, Ikematsu H, Uraoka T, Murakami T, Tsuji S, Abe T, Katagiri A, Hori S, Michida T, Suzuki T, Fukuzawa M, Kiriyama S, Fukase K, Murakami Y, Ishikawa H, Saito Y.
Long-Term Outcomes After Endoscopic Submucosal Dissection for Large Colorectal Epithelial Neoplasms: A Prospective, Multicenter, Cohort Trial from Japan. Gastroenterology. 2022 Jul 8:S0016-5085(22)00751-X. doi: 10.1053/j.gastro.2022.07.002. Epub ahead of print. PMID: 35810779.

- Endoscopic submucosal dissection for superficial gastrointestinal lesions
European Society of Gastrointestinal Endoscopy (ESGE)
Guideline – Update 2022