Jeunes gastroentérologues : gare à l'épuisement professionnel

La gastroentérologie est une spécialité très variée qui impose une certaine polyvalence, au prix parfois d’un surinvestissement. L'épuisement professionnel - objet d’un symposium lors de l’UEG Week de Barcelone - peut être prévenu.

Concilier la pratique quotidienne, les impératifs de la recherche - dont les déplacements qui perturbent les habitudes alimentaires et de sommeil - et la vie personnelle… La fatigue s'accumule, le corps ne suit plus, même les week-ends ou les vacances ne suffisent plus à recharger les batteries.

L'épuisement professionnel ne surgit pas, il se nourrit insidieusement du stress, des angoisses, de l’impuissance à trouver le juste équilibre entre les ambitions professionnelles et la réalité de l’exercice.

Les jeunes médecins en première ligne

Une enquête1 de l’American College of Gastroenterology (ACG)  en 2014 et 2015 avait permis d’obtenir 754 réponses complètes, évaluées ensuite à l'aide du Maslach Burnout Inventory. 49 % des participants se disaient épuisés, 17 % avoir un faible sentiment d'accomplissement personnel, 21 % se sentir dépersonnalisés. 45 % d’entre eux ont déclaré avoir éprouvé un épuisement émotionnel.

Ce chiffre de 49 % est à rapprocher de celui issu d’un rapport Medscape2 de 2017 : 50 % des gastroentérologues avaient signalé un épuisement professionnel. L’enquête de l’ACG avait indiqué que les niveaux d'épuisement professionnel sont plus élevés chez les femmes et les jeunes gastro-entérologues. Une étude3 de 2019 a d’ailleurs pointé l'ampleur de l'épuisement chez les jeunes gastro-entérologues.  

Vers le travail en équipe

La diversité des possibilités offertes aux jeunes gastroentérologues peut être abyssale. Mais nul ne doit ou ne peut tout faire. Faire un choix entre les activités appréciées et les autres est fondamental. C’est le travail en équipe qui permet à chacun de choisir des tâches en fonction de ses propres intérêts tout en couvrant toutes les facettes de la spécialité. C’est encore l’équipe qui, dès l’apparition d’une difficulté, peut venir en aide au praticien.

Il s’agit donc de mettre en œuvre une réelle culture de travail, seule à même d’endiguer l'épuisement lié à la charge de travail élevée, au stress et au manque de soutien. De préserver, donc, la motivation des jeunes médecins, la qualité de leur travail et la satisfaction des patients.

Les médecins seniors peuvent pour cela s’inspirer du modèle proposé par la clinique Mayo : proposer des entretiens réguliers aux jeunes praticiens, leur donner un feed-back et systématiquement répartir les tâches au sein d’un service sur plusieurs épaules.  

Conclusion

L'épuisement professionnel n'est pas une fatalité qui résulterait d'une nécessaire abnégation liée à l'accomplissement d’un quelconque devoir. Il s'agit plutôt de l’expression de déséquilibres, tant sur le plan personnel que sur le plan professionnel. L’épuisement professionnel des médecins peut être évité, notamment en établissant que nul ne peut tout faire, donc que ce sont les équipes et non les individus qui doivent porter la variété des tâches.  

Ceci exige un climat de travail qui doit notamment être instauré par les médecins seniors. En tant que membres à part entière de l’équipe clinique, ils sont autorisés (incités) à prendre leur part.

Références : 
1- A National Survey of Burnout in Gastroenterologists
Présentée à l’ACG 2017 par le Dr Carol Burke
2- Medscape Lifestyle Report 2017: Race and Ethnicity, Bias and Burnout
https://www.medscape.com/features/slideshow/lifestyle/2017/overview
3- Scope of Burnout Among Young Gastroenterologists and Practical Solutions from Gastroenterology and Other Disciplines
Barnes, E.L., Ketwaroo, G.A. & Shields, H.M. Dig Dis Sci (2019) 64: 302. https://doi.org/10.1007/s10620-018-5443-3