Dans les hôpitaux s’exprimer est nécessaire.

Dans les hôpitaux, les professionnels de la santé ayant pris en charge les victimes des attentats s’expriment sur ce qu’ils ont vécu. Jonathan, étudiant en médecine, de garde le soir des attentats, tente une semaine après de mettre des mots sur l’horreur : “Vidé, écœuré mais vivant”. Il se raccroche à l’expérience rassura

Dans les hôpitaux, les professionnels de la santé ayant pris en charge les victimes des attentats s’expriment sur ce qu’ils ont vécu. Jonathan, étudiant en médecine, de garde le soir des attentats, tente une semaine après de mettre des mots sur l’horreur : “Vidé, écœuré mais vivant”.

Il se raccroche à l’expérience rassurante de professionnels soudés pour chasser l’indicible. Selon ce jeune externe de la Pitié Salpêtrière, de garde le soir des attentats du 13 novembre “Cela a été un gros réconfort de s’apercevoir qu’on était une équipe, que dans ce chaos, tout était en fait très organisé et qu’on arrivait à prendre en charge chaque patient dans un temps record”.

Cette nuit-là les hôpitaux ont fait face à une médecine de guerre où il faut parer au plus pressé. Mais ils ont aussi rencontré des miracles parfois, comme cette balle qui s’est arrêtée dans le foie d’un patient à “deux centimètres du cœur”, raconte encore étonné le jeune homme en quatrième année de médecine.

Pour le psychiatre Nicolas Dantchev, en charge de la cellule psychologique mise en place à l’Hôtel-Dieu pour le personnel de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) “La situation a été exceptionnelle pour le personnel par son ampleur, le nombre inhabituel de blessés et leur jeunesse”. Il reçoit depuis plusieurs jours aide-soignants, infirmiers, médecins, ambulanciers… hantés parfois par un “sentiment paradoxal de culpabilité” et “Certains se sont projetés croyant voir leur enfant, d’autres leur ami”..

“Ils se disent qu’ils auraient pu transporter plus de victimes dans les ambulances, même si c’était impossible. Ils se font des reproches de manière tout à fait irrationnelle”, analyse le Dr Dantchev.

Jonathan se souvient s’être concentré sur son travail, porté par l’adrénaline et “Rassuré” par cette marée de blouses blanches “au garde à vous”, sous les ordres des médecins régulateurs. Et raconte, que ce n’est qu’une fois sa garde terminée qu’il ressent “l’énorme contrecoup” et que c’est sur le chemin qui le mène de l’hôpital à son domicile qu’il craque: “Je n’arrivais plus à m’arrêter de pleurer”.

De repos dimanche, l’étudiant en médecine attend avec impatience de revenir travailler lundi pour avoir des nouvelles du jeune homme sur qui il dit “avoir tout misé” et raccroché ses espoirs. Il veut retrouver ses collègues, ce groupe qui l’a porté. Mais les urgences du week-end passé, l’ambiance à l’hôpital est devenue lourde, triste, chacun à retrouvé ses esprits, le temps est à la réflexion. Une employée de l’hôpital partage : “L’hôpital est très calme, le silence impressionnant. Les couloirs sont vides, pas de chariots qui grincent, de personnel qui s’apostrophe. Tout le monde est concentré”

Le Dr Nicolas Dantchev explique “Le plus important est de mettre des mots sur les images, ses émotions, parler avec des amis, la famille, ne pas garder pour soi ces images qui certes resteront gravées, mais doivent avec le temps être de moins en moins répétitives”.

Le jeune homme conclu : “J’ai eu le sentiment du travail accompli, que tous ensemble, on avait réussi à sauver des gens. Ce que je retiens au-delà des images dures, c’est cette cohésion. C’était très beau”.

Texte : AFP / pg

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