Faut-il supprimer l’obligation vaccinale en France ?

L’idée parait presque révolutionnaire et pourtant … nous sommes l’un des derniers pays européens à la pratiquer. Les autres pays de niveau comparable obtiennent sans ces obligations des couvertures supérieures à 90%. La vaccination est un des outils de santé publique les plus

L’idée parait presque révolutionnaire et pourtant … nous sommes l’un des derniers pays européens à la pratiquer. Les autres pays de niveau comparable obtiennent sans ces obligations des couvertures supérieures à 90%. La vaccination est un des outils de santé publique les plus efficaces qui permet d’aller jusqu’à l’éradication totale de certaines maladies comme la variole en 1980. Le fait qu’elle protège collectivement les individus n’y est pas étranger. En effet, la couverture vaccinale ne doit pas forcément atteindre 100%, obtenir un seuil d’immunité de groupe suffisant dans la population permet de protéger les personnes qui n’ont pas pu être vaccinées. En mars 2014, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) publiait un avis relatif à la politique vaccinale, à l’obligation vaccinale en population générale et à la levée des obstacles financiers à la vaccination pour analyser la situation française et la faire évoluer.

Quelle est l’histoire du vaccin?

La première obligation vaccinale concernait la variole en 1902. Puis de 1938 à 1964 d’autres vaccinations : diphtérie, tétanos, tuberculose et poliomyélite sont aussi devenues obligatoires et le sont pour certaines encore. Il est important de maintenir des couvertures vaccinales élevées car il existe encore des zones endémiques diphtériques, certaines populations résistent encore à la vaccination ou bien car comme pour clostridium tetani le réservoir est tellurique.

Actuellement il existe d’autres obligations concernant la fièvre jaune en Guyane, les milieux professionnels, les voyageurs et les mesures sanitaires d’urgence. Cependant ces cas particuliers ne sont pas contestés.

Pourquoi remettre en cause les vaccinations obligatoires en population générale?

Les vaccins encore obligatoires aujourd’hui le sont pour des raisons historiques, mais sont-ils vraiment encore d’actualité ? De nombreux vaccins non obligatoires sont entrés dans les recommandations françaises comme ceux contre l’hépatite B ou le papillomavirus humain (HPV). Or ces deux maladies sont responsables d’environ 1300 décès par cirrhose ou cancer du foie pour la première et 1000 décès par cancer du col de l’utérus pour le HPV. Ce sont donc deux gros problèmes de santé publique et ils ne sont pour autant pas obligatoires. De plus, aux yeux de la population générale selon une enquête de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé 53% des personnes pensent que les vaccins obligatoires sont plus importants que les recommandés, qui ne sont pourtant pas à négliger !

Autre incohérence : si les primo-vaccinations sont obligatoires, les rappels, eux ne le sont pas alors que les rares cas de tétanos encore enregistrés actuellement sont liés à la non-réalisation des rappels !

Enfin depuis le 4 mars 2002, la loi relative aux droits des malades affirme la possibilité pour les patients de refuser des soins. Imposer la vaccination : n’est-ce pas aller à l’encontre de ce principe ? Surtout lorsque la vaccination est faite par des vaccins associant des valences vaccinales obligatoires et recommandées ne laissant finalement pas beaucoup de liberté de décision.

Qu’en pensent l’opinion publique et les professionnels de santé ?

L’enquête Nicolle menée en 2007 par l’INPES et l’InVS révèle que plus d’une personne sur deux est en faveur de l’obligation vaccinale, avec des différences importantes selon l’âge et le niveau d’études (mesure mieux acceptée chez les jeunes et chez les personnes ayant un faible niveau d’études). Si l’obligation vaccinale devait disparaître 75% des personnes interrogées souhaiteraient voir continuer la vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. Enfin, près des trois quarts s’accordent à dire que, en cas d’arrêt de cette vaccination, la diphtérie peut réémerger et que la poursuite de cette vaccination n’est pas motivée par la défense des intérêts des laboratoires pharmaceutiques. Cependant, environ un répondant sur cinq indique que, en cas de suspension de l’obligation de vaccination DTP, il n’y aurait plus besoin de faire vacciner les enfants ou bien que la décision de vaccination devrait être laissée aux parents.

Deux médecins sur cinq (généralistes et pédiatres) sont en faveur de l’obligation vaccinale. En cas de suspension de l’obligation, une très grande majorité soutient qu’elle continuerait à insister auprès des familles pour poursuivre les vaccinations. Néanmoins les avis des pédiatres et des généralistes divergent concernant le vaccin contre l’hépatite B  63,5% des pédiatres sont « tout à fait favorables » à la vaccination des nourrissons contre seulement 32,6% des généralistes.

Dans tous les cas, si l’obligation vaccinale devait disparaître en France le processus devrait s’accompagner d’une forte communication. En effet ces obligations représentent un guide important pour la conduite de la population générale. De plus c’est à l’occasion de ces consultations de vaccinations obligatoires que le médecin peut évoquer d’autres vaccinations qui semblent utiles mais non obligatoires. Mais c’est sûrement la peur de voir chuter soudainement la couverture vaccinale qui maintient encore ce régime d’obligation.

D’autre part, si ce régime persiste encore, la liste des vaccinations obligatoires devrait aussi être révisée pour être en phase avec les enjeux de santé publique actuels. Notamment le vaccin Rougeole-Oreillon-Rubéole devrait devenir obligatoire selon la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale et l’Académie nationale de pharmacie.

Et vous, qu’en pensez-vous ?