Est-on mieux soigné en clinique privée, plutôt qu’à l’hôpital public ?

Compétences, moyens financiers, attente raccourcie : est-on mieux soigné dans le système privé ? Avec des hôpitaux publics à bout de souffle, le débat est relancé. Bernard Kron livre son point de vue sur la question.

D'entrée de jeu, la question est sensible.

D'abord, parce que la qualité ne se décrète pas par le lieu, mais par la seule compétence des soignants alliée à la fonctionnalité des matériels.

D’un point de vue économique ensuite, l’Hôpital c’est 40 % du budget pour 25 % des soins, avec un déficit cumulé de plus de 30Mds. La dette a explosé; pourtant des dizaines de milliers de lits ont fermé et des établissements, s’ils n’ont pas fermé, sont menacés de fermeture.

100 000 médecins travaillent dans nos hôpitaux, mais 30 % de postes titulaires ne sont pas pourvus et 30 000 médecins qui ne sont pas issus de nos diplômes les occupent.

Une fois de plus, la machine à mensonge se met en marche. Alors qu’il est évident que le système de santé est à bout de souffle, à force d’être mangé par une bureaucratisation inhérente à son gigantisme, on trouve encore des urgentistes pour expliquer qu’il vaut mieux soigner le mal par le mal :

Ils demandent toujours plus d’hôpitaux gérés par l’État, avec toujours plus d’argent public déversé dans une énorme machine incontrôlable et incontrôlée. « Donc, augmentons la dépense publique de santé en France et tout ira mieux », disent-ils !

Le système de santé français est coûteux. Avec 11 % du PIB consacré à la santé, la France figure parmi les champions du monde de la dépense médicale. Pour un résultat médiocre !


L’exemple des maternités

On est mieux soigné, mieux dorloté dans les petites maternités que dans les « usines à bébés » clament haut et fort les personnels, qui défilent quand une maternité est menacée : La France reste cependant mal classée en termes de décès maternel par hémorragie de la délivrance et en complications néonatales.

Le seuil de sécurité se trouve aux alentours de 1000 accouchements par ans ! On ne doit plus accoucher dans sa voiture ou chez soi : une proximité raisonnable reste donc nécessaire.

Les Blocs opératoires 

120 blocs opératoires pour des raisons de sécurité et de qualité de soins auraient dû être fermés. Dans les établissements à faible activité, le travail intérimaire en rapport avec la vacance des postes (entre 25 et 33 % selon les spécialités) s’ajoute au peu d’expérience des équipes, cumulant les risques. 

Opérer avec des chirurgiens mal formés, des anesthésistes et des infirmières vacataires ne créent pas des conditions propices aux meilleurs soins.

La transplantation : la concentration est incontournable

En regardant l’éparpillement des centres de transplantation, des questions se posent. Pourquoi 5 services parisiens font-ils encore des greffes d’organes ? Qu’attend-on pour concentrer l’expérience sur un ou deux centres ? À Lyon, la bataille fait rage pour empêcher le regroupement de deux unités de transplantation en une ! Les arguments les plus éculés sont utilisés, alors que sécurité ne rime en rien avec proximité.

Les urgences : De petits hôpitaux non ; des cliniques privées oui !

Des hôpitaux neufs sont sortis de terre, mais à quel prix ? Ils sont le bel arbre qui cache la décrépitude des autres. Pendant ce temps, les malades attendent aux urgences surchargées : 8 millions de patients en 1988, plus de 21 millions en 2017 !

L’hôpital comme la ville ne doit pas être la variable d’ajustement du taux de chômage dans une commune. Il doit être un lieu de soins hautement technologiques ou les équipes rassemblées agissent en commun contre la souffrance.

Trop de postes pourvus par des médecins qui n’ont pas nos diplômes et trop de vacataires, voire de mercenaires  coûteux !

Des drames : des médecins démotivés et les suicides

La démotivation des équipes entraîne suicides, arrêts de travail, démissions, insatisfaction des usagers, burn-out, les situations de harcèlement… Socialement, le système est dans une auto-destruction et ne produit que de la souffrance.

En cas de doute, il suffit d’écouter les confrères raconter leur CME ou lire les appels et lettres aux pouvoirs publics.

La proximité est-elle la solution ? 

Oui pour Pelloux, non pour Vallancien : Ils ont tous les deux à la fois tort et raison !

Deux explications se détachent pour imposer le regroupement des personnels et des matériels sur des plateaux interventionnels adaptés quitte à faire un peu plus de kilomètres pour y accéder :

Les équipes qui opèrent souvent acquièrent l’expérience des cas les plus difficiles et savent mieux gérer les complications qui peuvent survenir.

Refuser de se déplacer pour un acte chirurgical est un non-sens, quand les mêmes le font pour acheter moins cher un meuble.

Dans les établissements à faible production, le travail intérimaire en rapport avec la vacance des postes (entre 25 et 33 % selon les spécialités) s’ajoute au peu d’expérience des équipes, cumulant des risques évitables. Opérer avec des anesthésistes et des infirmières vacataires ne crée pas l’écosystème propice aux meilleurs soins.

Pour les chirurgiens, opérer dans un petit centre hospitalier à distance de leur lieu habituel de travail ne constitue pas la meilleure continuité des soins en cas de complication imprévue.

C’est dans les cliniques privées que cette compétence est le mieux située, mais avec la politique des regroupements en chaînes et avec les normes, des centaines ont disparu ! 

C’est dans ces établissements que la proximité permettait de traiter la plupart des urgences.

Toute la chaîne est à reconstruire avant que le système explose.