Écosse : l'alcool plus cher épargne des vies

Fixer un prix minimum pour les spiritueux bon marché permet de diminuer la mortalité liée à l'alcool, notamment dans les zones défavorisées.



En mai 2018, le gouvernement écossais a introduit une législation (Minimum Unit Pricing - MUP) visant à fixer un prix minimum de 50 pence (57 cents) par unité d'alcool (soit 10 ml ou 8g d'alcool pur). Cette politique devait réduire la consommation d'alcool chez les gros buveurs et avoir un impact principalement sur la consommation de spiritueux à bas prix. 

Des études antérieures indiquent que l'introduction de cette politique a diminué les ventes d'alcool de 3%. D'autres travaux suggèrent que les réductions les plus importantes ont eu lieu parmi les ménages qui achètent le plus d'alcool. Cependant, aucune étude n'avait jusqu’alors cherché à savoir si cette politique a conduit à une réduction des hospitalisations et des décès liés à l'alcool à l'échelle nationale. 

L'Écosse a le taux de mortalité lié à l'alcool le plus élevé du Royaume-Uni. Les personnes vivant dans les zones les plus défavorisées sur le plan socio-économique connaissent des taux de mortalité plus de cinq fois supérieurs à ceux des personnes vivant dans les zones les moins défavorisées. 

La politique du prix unitaire minimum visait à remédier à cette inégalité, en réduisant la consommation d'alcool, et donc les dommages pour la santé, chez les gros buveurs qui ont tendance à acheter l'alcool le moins cher.

Écosse - Angleterre 

Les résultats de l’étude indiquent que cette politique a un impact positif sur la santé publique : sa mise en œuvre est associée à une diminution des décès liés à l'alcool chez les hommes et plus généralement chez les personnes vivant dans les régions les plus défavorisées d'Écosse, où l’on  meurt de manière disproportionnée des conséquences de l'alcool.  

Les chercheurs ont obtenu des informations sur les hospitalisations et les décès liés à l'alcool à partir de bases de données écossaises et anglaises datant d’avant l'introduction de la législation MUP (de janvier 2012 à avril 2018) puis après (de mai 2018 à décembre 2020). 

Les données de l'Angleterre ont été utilisées pour constituer un groupe de contrôle, car c’est la partie du Royaume-Uni où cette législation MUP n'a pas été mise en œuvre. 

Les chercheurs ont donc pu comparer la variation des admissions à l'hôpital et des décès au cours des deux périodes et entre les deux pays, tout en tenant compte d’autres facteurs comme le niveau des restrictions gouvernementales pendant la pandémie de COVID-19.

Moins de morts par maladies chroniques   

Au cours des deux années et huit mois qui ont suivi la mise en œuvre du MUP, une diminution de 13,4 % des décès liés à l'alcool a été calculée (par rapport à une estimation de ce qui se serait produit en l'absence de législation MUP). Cela correspond à environ 150 décès en moyenne chaque année. L'étude a également observé une diminution de 4,1 % des admissions à l'hôpital liées à l'alcool (mais cette diminution n'était pas statistiquement significative).

Les auteurs suggèrent que la réduction globale des décès liés à l'alcool est due à une diminution des décès dus à des maladies chroniques causées par la consommation d'alcool. La mise en œuvre de la MUP a été associée à une réduction de 11,7% des décès dus à une maladie alcoolique du foie et à une réduction de 23% des décès dus au syndrome de dépendance à l'alcool.

Cependant, la MUP a également été associée à une augmentation du taux de décès et d'hospitalisations dus à des affections de courte durée causées par la consommation d'alcool, telles que les intoxications alcooliques. Toutefois, ces résultats n'étaient pas statistiquement significatifs. Les auteurs précisent également que les affections aiguës ne représentent qu'environ 5% des décès liés à l'alcool en Écosse. Ces estimations présentent donc un degré élevé d'incertitude.

Dans tous les cas, au vu du ratio entre les maladies chronqiues et aiguës, cette politique du prix unitaire minimum est globalement bénéfique pour la santé des citoyens écossais.


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Référence :
Wyper GMA, Mackay DF, Fraser C, Lewsey J, Robinson M, Beeston C, Giles L.
Evaluating the impact of alcohol minimum unit pricing on deaths and hospitalisations in Scotland : a controlled interrupted time series study.
Lancet. 2023 Mar 20:S0140-6736(23)00497-X. doi : 10.1016/S0140-6736(23)00497-X. Epub ahead of print. PMID : 36963415.