Connaissant les liens entre autisme et microbiote intestinal, quelles sont les perspectives de prise en charge ?

Retour sur les perspectives de prise en charge de patients atteints de troubles de la sphère autistique, par des méthodes de rééquilibrage du microbiote intestinal.

Un déséquilibre du microbiote intestinal peut entrainer de nombreuses pathologies, comme l'autisme, mais quelles sont les méthodes de rééquilibrage découvertes au travers d'études ?

Et si on donnait des antibiotiques ?

Un premier modèle était de se dire qu’il réside des bactéries indésirables dans le tract digestif des enfants autistes, rééquilibrer ce microbiote en chassant ces bactéries permettrait de voir les troubles qu’elles causent s’effacer eux aussi.

Une recherche a donc administré de la vancomycine orale agissant localement au niveau du tube digestif aux enfants atteints sans obtenir de résultats concluants. Cet échec peut être dû à la haute capacité de résistance aux antibiotiques de Clostridium. Par la suite, un antibiotique franchissant la barrière hémato-encéphalique a été administré pour tester son potentiel effet neuroprotecteur direct sans arriver à des résultats concluants. (Pardo et al. 2013)

Et si on donnait des bactéries ?

Un deuxième modèle est allé plus loin : les enfants malades possèdent un microbiote déséquilibré responsable des troubles, remplacer ce microbiote pathologique par le microbiote d’un individu sain permettrait de soigner ces enfants.

Une étude récente cherche à tester l'efficacité de cette thérapie par transfert de microbiote (MTT: Microbiote Transfert Therapy) chez des enfants souffrant de TSA accompagnés de douleurs digestives (Kang et al. Microbiome 2017). Dans un premier temps la démarche consiste à l’élimination complète du microbiote par un traitement antibiotique local de deux semaines. Ensuite un lavage gastrique est effectué pour s’assurer qu’il ne reste plus de bactérie ni d’antibiotique dans le tractus gastro-intestinal des sujets malades. Parallèlement afin de réduire l’acidité gastrique et d’optimiser l’implantation du microbiote sain, un traitement par inhibiteur de pompe à proton est mis en place. Les sujets sont enfin prêts pour le transfert de microbiote intestinal. Ce dernier provient de la culture d'échantillons de microbiote de donneurs sains. Une première administration de 2,5x10^12 bactéries est effectuée soit par voie orale (dans du chocolat au lait...) soit par voie rectale. Il s’ensuit une série de plus petites administrations (2,5x10^9 bactéries) pendant huit semaines.

Lors du suivi des patients un rétablissement quantitatif et qualitatif du microbiote est observé. Le taux en bactéries anaérobies tels Bifidobacterium, Prevotella et Desulfovibrio a augmenté après le transfert. Qualitativement la composition bactérienne se normalise. Le microbiote sain transféré s'intègre donc à son receveur ce qui a des répercussions cliniques encourageantes.

L’évaluation des symptômes gastro-intestinales réalisée à l’aide du Gastrointestinal Symptom Rating Scale (GSRS : plus le score est haut plus il y a de symptômes tels que diarrhée, constipation, reflux, douleurs...) indique une réduction de 50% des symptômes en moyenne. L’évolution des TSA s’est elle aussi montrée positive au niveau des différents indicateurs utilisés. Le recours au Parents Global Impression II (PGI-II, évaluation de 17 symptômes du TSA en demandant directement le ressenti des parents) est particulièrement encourageant : les parents décrivent de nettes améliorations du comportement de leur enfant.

Le développement de la recherche sur le microbiote intestinal apporte de nouvelles pistes dans la prise en charge de maladies non intestinales

Longtemps négligé à cause de limites technologiques, la recherche comprend aujourd’hui de mieux en mieux le fonctionnement du microbiote. Son implication dans diverses pathologies comme dans l’autisme est reconnu. L’enjeu est à présent d’expliquer au mieux son rôle physiopathologique dans ces différentes maladies, afin d’en tirer un potentiel therapeutique maximal.

La thérapie par transfert de microbiote, par exemple, présente une alternative prometteuse dans la prise en charge de l’autisme, et pourrait bien l’être pour de nombreuses autres pathologies. Il nous reste encore beaucoup à apprendre de nos milliards de colocataires.