Les acides biliaires totaux biomarqueurs du diabète gestationnel

Un diabète gestationnel (DG) peut se développer suite à l’augmentation de la résistance à l’insuline, phénomène normal lors d’une grossesse. L’incidence du DG croît à l’échelle mondiale (entre 3 et 14%) et atteint 9.3% des femmes enceintes dans le nord de la Chine. Contexte L’hyperglycémie peut être dangereuse pour la femme enceinte, provoquant

Un diabète gestationnel (DG) peut se développer suite à l’augmentation de la résistance à l’insuline, phénomène normal lors d’une grossesse. L’incidence du DG croît à l’échelle mondiale (entre 3 et 14%) et atteint 9.3% des femmes enceintes dans le nord de la Chine.

Contexte

L’hyperglycémie peut être dangereuse pour la femme enceinte, provoquant pré-éclampsie, augmentation du taux de césariennes, une macrosomie, une rupture prématurée des membranes fœtales, ou l’installation d’un diabète de type 2 (DT2). Différents biomarqueurs pré-gestationnels ou du 1er trimestre permettent d’évaluer le risque de diabète gestationnel et d’adopter un suivi particulier des femmes à risque. Les acides biliaires sont reconnus comme d’importance pour le métabolisme humain et ont été associés aux phénomène de résistance à l’insuline et au développement du DT2. Pourtant, l’évolution quantitative des acides biliaires pendant la grossesse et son association au risque de DG sont méconnues.

Etude et méthodes

Entre janvier 2013 et août 2015, 742 femmes enceintes ont été recrutées dans un hôpital universitaire de Shanghai (Chine), pour une étude prospective de cohorte cas-témoin évaluant les taux d’acides biliaires au premier trimestre de grossesse et l’incidence d’un DG (DOI: 10.1038/srep34070). Le diagnostic de DG a été réalisé entre 24 et 28 semaines de gestation par un test de tolérance au glucose (mesure du glucose sérique à jeun, 1h, et 2h après administration orale de 75g de glucose). Les participantes ont complété un questionnaire d’informations générales sur l’état de santé, l’historique des grossesses, la consommation d’alcool et de tabac. La taille, le poids et la pression sanguine ont été mesurés lors de visites médicales, et des échantillons sanguins ont été prélevés à jeun pendant le 1e trimestre gestationnel pour mesurer les taux d’acides biliaires, d’hémoglobine et d’albumine glyquées, de marqueurs de la fonction hépato-rénale, des lipides sériques, de glucose, insuline, et mesurer le degré de résistance à l’insuline et sa sécrétion.

Résultats

Les participantes ayant développé un diabète gestationnel montrent une plus grande proportion d’historique familial de diabète et de multiparité. Des différences significatives sont relevées pour la majorité des marqueurs suivis. Parmi les femmes recrutées, 179 avec DG et 151 sans DG ont été suivies jusqu’au terme de leur grossesse. Les deux groupes montrent des différences d’âge, d’IMC pré-gestationnel, de pression sanguine, d’acides biliaires, de cholinesterase (ChE) et de triglycérides (TG) pendant la grossesse. De plus, la césarienne (26.4 vs. 17.3%) et la macrosomie (11.9 vs. 3.4%), ainsi que le poids de l’enfant à la naissance (3385.3 vs. 3279.4g) sont plus élevés dans le groupe des DG.

Les données montrent une association significative du niveau des acides biliaires totaux (ABT) avec le DG (OR=1.31, IC95%=[1.15-1.50], p=0.008). Parmi les complications liées au DG, les ABT sont significativement associés à la macrosomie (OR=1.53), mais pas à la césarienne, pré-éclampsie ou rupture prématurée des membranes. Une association positive est également détectée entre ABT et degré de résistance à l’insuline, sécrétion d’insuline et poids à la naissance (facteurs de corrélation r=0.08, 0.08 et 0.12, p<0.05, respectivement).

L’analyse d’association entre ABT et incidence du DG a également été réalisée par sous-groupes selon le niveau d’ABT (<1.0µM; 1.0-2.0µM; 2.0-3.0µM; 3.0-4.0µM; >4.0µM). Une incidence de 23.9% est révélée pour la 1e catégorie. L’incidence et le risque de DG sont significativement augmentés pour les catégories 3 (37.8%, OR=1.98) et 5 (64.2%, OR=5.98). Après ajustement des données aux facteurs confondants, les risques de DG apparaissent encore plus élevés pour ces catégories (OR=2.53 et 7.72, respectivement).

Conclusions

Cette étude confirme l’association entre niveaux d’acides biliaires et diabète gestationnel sur une cohorte de femmes enceintes chinoises, ce niveau étant significativement plus élevé au premier trimestre de grossesse chez les femmes développant un DG. Le risque de DG est multiplié par 6.72 pour les femmes présentant un niveau d’ABT dans la catégorie la plus élevée (>4.0µM) par rapport à la catégorie la plus basse (<1.0µM). La césarienne et la macrosomie sont des complications liées à l’hypertension, et apparaissent ici plus fréquentes chez les femmes atteintes de DG.

De part sa facilité de mesure et les résultats de cette étude, le niveau d’ABT au premier trimestre semble être un biomarqueur idéal pour identifier les femmes à risque de développer un diabète gestationnel. Ceci demande toutefois à être conforté par de futures études prenant en considération des populations d’ethnicité différentes, ainsi que des facteurs confondants de type alimentaire et d’activité physique omis dans cette étude, voire de s’intéresser individuellement aux associations des différents acides biliaires.

Texte : jd / esanum
Photo : Halfpoint / Shutterstock


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