Cicatriser en un coup de cuiller à pot

La recherche scientifique réussit parfois à dénicher des merveilles avec élégance et simplicité. Cette douceur ambrée qu’est le miel ne serait pas qu’un simple remède contre la toux en période automnale.

Après les travaux du Professeur Bernard Descottes de l’Université de Limoges dans les années 2000, les résultats sont sans appel, l’apithérapie ouvre une voie dans le traitement des plaies.
L’utilisation thérapeutique du miel ne date pourtant pas d’hier.
Dès l'Antiquité, le miel est appliqué pour embellir la peau et soigner les blessures. Hippocrate lui même, le prescrivait pour combattre la fièvre, les blessures, les ulcères et les plaies purulentes. Quelques siècles plus tard, c’est Paracelse qui met en avant ses bienfaits antiseptiques dans la guérison des infections et le soin des verrues, boutons infectieux ou furoncles. Ce sera en guise de cicatrisant des plaies des soldats lors des conflits mondiaux du 20ème siècle que le miel sera encore une fois utile.

Depuis 25 ans au CHU de Limoges, et maintenant dans le monde entier, les chirurgiens utilisent quotidiennement les vertus du miel pour traiter des plaies simples aux plus complexes, profondes ou infectées, ainsi que kystes saccrococcygiens, escarres, ulcères, brûlures ou amputations, pour ne citer que la partie émergée du champ des applications envisageables.

Antimicrobien, anti-inflammatoire et cicatrisant, le miel doit cette polyvalence à ses propriétés physico-chimiques.
A ce jour, le rôle anti-inflammatoire est attribué aux flavonoïdes, proches cousins des polyphénols, neutralisant les radicaux hydroxyles.
La cicatrisation est permise une forte concentration en sucres (fructose, glucose et saccharose) et une faible teneur en eau (20%). Le pouvoir osmotique du sucre assèche la plaie, élimine les débris nécrotiques de son lit et favorise le bourgeonnement cellulaire. Une composition enzymatique de choix confère enfin au nectar ses bienfaits antimicrobiens. En effet, la Glucoxydase produit à partir des substrats (Sucre + Eau) de l’eau oxygénée et de l’acide gluconique. Ainsi, l’acidité du miel (entre 3,2 et 5,4) et l’action antiseptique du peroxyde d’hydrogène n’offrent guère de chance aux microbes de s’en tirer. Mises en évidence récemment par le Centre médicale universitaire d’Amsterdam, des molécules proches des bêta-défensines humaines se trouvent dans le miel et grossiraient les rangs des acteurs bactericides.
Par ailleurs en 2008, une découverte complémentaire de l’Université de Dresde a permis d’identifier la présence de Methylglyoxal au sein du mélange. Cette molécule cytotoxique se trouve dans les milieux très riche en sucre et participe à la détersion de la plaie en profondeur. On lui attribue une action contre Staphylococcus Aureus ou encore Pseudomonas Aeroginosa. Un espoir quand ces deux agents pathogènes montrent des résistances aux antibiotiques les plus agressifs ?

Il est cependant évident que la composition chimique des miels varie de l’un à l’autre, que le miel est périssable, que les pansements demandent à être changés plus régulièrement que lors d’un traitement ordinaire, que l’import de miel est à surveiller (les cires n’ont pas les vertus du miel). Toutefois, la cicatrisation est rapidement obtenue, les plaies sont propres, chronicité, complication et inflammation sont éloignées d’un coup de cuiller, et l’acceptation de la lésion par le patient se voit facilitée. L’utilisation du miel dans les hôpitaux fait légion. Un produit médicalisé est commercialisé avec la mention « CE », (à usage unique le miel alimentaire convient aussi parfaitement). Ce versant de l’apithérapie n’est pas qu’un vulgaire tubercule de renoncule à appliquer les soirs de pleine lune sur les verrues. Les quelques 3000 plaies profondes de la paroi abdominale traitées au CHU de Limoges dans les années 2000 en sont une preuve.