(Par les Drs Hubertus Glaser et Jörg Zorn)
En Allemagne, l’université de Mayence vient de publier une étude1 sur l’utilisation de la thérapie par thrombolyse et les résultats chez les patients présentant une embolie pulmonaire aiguë.
L'importance clinique de l'embolie pulmonaire en Allemagne est connue :
Au cours des dernières décennies, les taux annuels d'incidence de l'embolie pulmonaire ont augmenté, tandis que les taux de mortalité ont diminué. L'augmentation du nombre de nouveaux cas est probablement due à l'évolution démographique et technologique et à l'amélioration de l'imagerie médicale. La diminution de la mortalité, quant à elle, peut être attribuée à une meilleure gestion des risques, d'une part, et à un plus grand nombre de patients présentant des embolies moins conséquentes et moins dangereuses d'autre part.
Néanmoins, malgré les campagnes de sensibilisation sur la prévention des thromboses, l'embolie pulmonaire reste la première cause de décès évitables chez les patients hospitalisés.1
Les recommandations actuelles préconisent la thrombolyse systémique chez les patients à hauts risques cardiovasculaires présentant une embolie pulmonaire. Chez certains patients normotendus menacés de décompensation imminente, elle peut aussi être envisagée. Une étude 3 menée aux États-Unis a montré que cette recommandation permet un taux de survie plus élevé, et que le recours à la thrombolyse n’est pas suffisant.
Ces résultats sont confirmés par l'étude des chercheurs de l’université de Mayence en coopération avec l’hôpital universitaire La Charité de Berlin.1 L'analyse des données de plus de 885 000 patients atteints d'embolie pulmonaire, hospitalisés en Allemagne entre 2005 et 2015, a montré :
Concernant la thrombolyse, la situation est la suivante :
Le plus grand effet de la reperfusion dans l'instabilité hémodynamique a été observé chez les patients en état de choc mais sans arrêt circulatoire : leur mortalité à l'hôpital sans thrombolyse était de 49,9 % versus 28,6 % avec thrombolyse (OR* 0,42)
La mortalité est également moins élevée pour les patients atteints de RCR, mais est plus difficilement décelable (OR 0,92). Le taux d’hémorragies intracérébrales est passé de 0,7 % à 1,5 % sous thrombolyse chez les patients présentant une embolie pulmonaire instable.
La reperfusion chirurgicale par embolectomie a été utilisée chez un nombre limité de patients (0,2 %) et a également réduit la mortalité (OR 0,55).
La réduction de la mortalité hospitalière de plus de 50 %, indépendamment de l'âge, du sexe et des maladies concomitantes, est notable.
Chez les patients atteints d'embolie pulmonaire et d'instabilité cardiovasculaire, et sans contre-indication absolue, la thrombolyse systémique doit être utilisée le plus tôt possible.
Limites de l'étude : elle ne fournit pas de données sur les autres traitements en cours, sur l'évolution de l'instabilité cardiovasculaire et sur les causes de décès.
Références :
1. Keller K et al. Trends in thrombolytic treatment and outcomes of acute pulmonary embolism in Germany. Eur Heart J. 2019. pii:ehz236. doi:10.1093/eurheartj/ehz236
2. Wilkens H, Held M. Lungenarterienembolie: Status 2018. Dtsch Arztebl 2018;115(24):[8]. doi:10.3238/PersPneumo.2018.06.15.002
3. Stein PD, Matta F. Thrombolytic therapy in unstable patients with acute pulmonary embolism: saves lives but underused. Am J Med 2012;125:465-70
* OR = Odds Ratio ou risque relatif rapproché